Samedi 1er octobre, 14h48. Alors que quelques personnes continuent de rentrer dans le grand amphithéâtre, la tension monte. The Paul and Mike Show présidé par Juliette Delsart et Jeanne Perrien, opposant Reims et Le Havre, va bientôt commencer.
Les attentes sont à leur comble. Après des pré-sélections mouvementées ; un dieu descendu de l’Olympe, un coiffeur refoulé et des shots de vodka, la soirée avait annoncé la couleur de ce show, que l’on espérait époustouflant.
Contrairement à notre première année de la voie française, Otsana Smith (n’ayant malheureusement pas pu concourir pour des raisons médicales), le public est au rendez-vous. De même que l’esprit de compétition, la bonne humeur et les beaux jeux de mots.
Néanmoins, l’on pouvait ressentir à travers chaque sourire une panique et un stress dû à une pensée que l’on partageait tous ; La French Track Havraise allait-elle déclarer forfait ?
“Does law vanish when cops disappear ?”
Du côté de Reims, on retrouve Eléonore Shaw et Audrey Morganstern, défendant le oui. Ayant passé toutes deux plus de la moitié (voir la totalité pour Audrey) de leur vie aux Etats-Unis, l’on soupçonne le jury de leur avoir facilité la tâche. Cependant, il faut tout de même admettre que les deux oratrices nous ont servi un discours plutôt étonnant pour l’English track havraise. Celui-ci était fondé sur l’ironie, le second degré, mais de manière assez subtile. Il serait même assez juste de dire qu’elles nous ont fait de l’éloquence à la française.
Victor David Lin et Sujanyaa Sriram défendaient donc le non. A la manière de Vice-Versa, ils nous ont fait rentrer dans leur tête afin que nous puissions assister à une conversation entre leur morale et leur petit démon. Le duo havrais, très opposés dans leur manière de prendre le micro, en a ainsi fait rire plus d’un. Comme leur pré-sélection, notre English Track fut très philosophique, à l’exception qu’ils ne nous ont pas parlée, cette fois-ci, du fameux fruit défendu.
Leur débat était à l’image de leur discours respectifs : mouvementé. Reims domine, mais le Havre ne se laisse pas abattre; prêt à se défendre en mentionnant l’amour d’Hitler pour sa mère, argument osé indéniablement, mais coupant court à toute réponse rémoise. Toutefois, malgré la bonne défense havraise, Reims repart avec le trophée.
L’après-midi n’est pas fini ; Clémentine Assayag concourra seule. On pouvait ressentir la fierté des supporters havrais, décidés à encourager et soutenir jusqu’au bout notre deuxième année.
Pendant l’entracte, les premières années s’agitent. La bouche remplie de mini pizza, l’on aurait dit des petites fourmis sans leur reine; marchant sans suivre de réelles directions, nourriture en main, à la recherche de réponses. Bien contents, d’un côté, que ce soit Léonard Im qui ait la charge de remplacer Otsana au moment du débat. D’un autre, inquiets pour Clémentine qui a ré-écrit un discours in extremis afin de concourir.
“Faut-il céder à la tentation ?”
C’est ainsi avec brio que notre Havraise défendit l’affirmative. Ses doux jeux de mots et son éloquence ont rendu l’assemblée bouche bée. Nous nous attendions à un discours baclé, même si rempli de volonté. Et sûrement l’était-il, mais lorsqu’elle l’a prononcé, il avait l’air plus que préparé. Avec ses trois minutes, Clémentine à dit “oui” à la tentation de monter seule sur scène, de prendre le micro et surtout de piquer les Rémois de façon très calme et posée.
Calmes et posés ne sont d’ailleurs sûrement pas les termes que nous aurions utilisés pour décrire les Rémois. Bien au contraire, Sacha Bondeville (originaire du Havre) et Aurèle Delahaye étaient à l’attaque cet après-midi. Avec un discours tourné autour du sarcasme, de l’humour noir, et de références à La Flamme ; les Rémois ont su faire rire les supporters havrais, pourtant bien déterminés à défendre leur campus coûte que coûte.
Le début du débat fut toutefois étonnant, on s’attendait à des piques et nous avons eu des questions académiques, si ce n’est philosophique. “Quelle est la différence entre tentation et envie”, “avez-vous réellement répondu au sujet ?”… Heureusement, Léonard, remplissant avec perfection son rôle, attaqua avec une subtilité bienvenue. Des questions courtes, des réponses claires et nettes, de quoi déstabiliser les Rémois.
Le jury fut on ne peut plus clair ; l’humour noir ne leur a pas plu. “Ce qu’il y a de beau avec l’éloquence c’est que l’on peut oser, mais faut-il encore savoir doser” conclut Monsieur Thibaut Chaix, ancien élève de Sciences Po, conseiller municipal de la ville du Havre et jury du Paul and Mike Show. L’équipe rémoise était ainsi le lièvre, pensant aller plus vite grâce à leur supériorité numérique. Mais notre tortue havraise a su montrer que la patience et le calme étaient souvent préférables. Le trophée est bien entendu “resté à la maison”.
C’est sur cette note que s’est fini le Show. Après un dernier “Ici c’est ? Le Havre !”, l’amphithéâtre s’est vidé, des mains se sont serrées et des sourires se sont échangés. Quelle belle après-midi pour le campus du Havre.
Chan-lekha KLINCHUEN
Photo credits: photography club
Le Dragon Déchaîné 