Joaquín Gosálvez Castillo est un étudiant dans sa première année à SciencesPo. Il nous fait part de sa réflexion sur les défis environnementaux et les actions que nous pourrions et devrions prendre face à une crise écologique toujours plus alarmante.
« Vous allez connaître la fin du pétrole », cet énoncé court, clair, percutant m’a énormément impacté lorsque je l’ai entendu en cours de Science Fiction. Pourtant je le savais déjà, mais très souvent on préfère oublier, cacher dans un tiroir secret ce que la conscience ne peut pas supporter par simple instinct de survie…
L’année 2019 semblait avoir laissé derrière elle les terribles feux de l’Amazonie qui ont ravagé l’équivalent de 906 000 stades de football. L’année 2020 ne commence pas mieux : les incendies en Australie persistent, la surface brûlée est plus de 18 fois supérieure à celle ayant connu le même sort en Amazonie, tout cela sans parler des 6 500 bâtiments brûlés et des 28 personnes mortes… À ce stade, le lecteur pourra penser qu’il s’agit d’un autre article ennuyant sur l’environnement qui ne cherche qu’à faire la morale. Cet article est plutôt une invitation à la réflexion sur notre action tenant compte de l’état des lieux de la vie dans notre planète, des solutions efficaces qui peuvent être menées et de la question de la responsabilité et de la volonté de résoudre cette crise écologique, tant au niveau individuel que collectif.
Abordons tout d’abord le diagnostic. En effet, il n’est pas bon! Si la simple observation et le constat empirique de l’accroissement des catastrophes naturelles sont déjà effrayants, alors le fait que la pollution soit la sixième cause de mortalité dans le monde et que l’OMS affirme que 9 personnes sur 10 respirent un air pollué, devraient nous faire paniquer. D’ailleurs, un million d’espèces animales et végétales sont menacées de disparition à cause du réchauffement climatique comme le démontre une étude dirigée par le scientifique Chris Tomas et publiée dans la revue Nature, cela entraînerait de même de graves conséquences comme une pénurie aggravée des ressources alimentaires sachant que les animaux pollinisateurs sont fondamentaux dans le processus de production d’aliments. C’est justement de cette raréfaction de ressources provoquée par l’action humaine, profondément corrélée avec notre économie, notre mode de production et le dérèglement climatique, qui est avant tout un vecteur de crises pour les êtres humains. Il s’agit donc d’un problème principal qui remettra directement en question la survie de l’espèce humaine et de nos modes de vie actuels, ainsi qu’il mettra sur la table la définition de la politique comme la gestion sociale de la précarité. Pour comprendre l’ampleur de ce dernier défi croissant, il suffit de signaler ce que les études actuelles sont en train de démontrer : tandis que nous atteindrons prochainement un pic de population d’environ dix milliards de personnes, les ressources fossiles et nucléaire sont vouées à leur épuisement aant la fin du XXIème siècle, à l’exception du charbon. De même, des métaux comme l’or, l’argent et le zinc disparaîtront avant 2050, tout comme les matériaux utilisés dans la production actuelle des énergies renouvelables tels l’indium pour les éoliennes ou le plomb et l’antimoine pour les batteries de voitures électriques. Il faut également tenir compte du fait que la production d’énergie renouvelable nécessite d’infrastructures qui sont construites grâce aux énergies fossiles. En effet, la transition énergétique ne s’est jamais faite puisque la consommation d’énergie croît tout comme le recours aux énergies fossiles qui représentent 80% des énergies produites mondialement.
Ces problèmes complexes et menaçants font appel à des solutions efficaces tant au niveau collectif qu’au niveau individuel. Je ne peux que modestement proposer au lecteur d’analyser avec lui quelques idées qui incitent à l’action concrète. Tout d’abord, il est essentiel de parler de l’agriculture relocalisée qui est une excellente mesure tant pour les agriculteurs locaux qui travaillent dans des conditions sociales dignes que pour la prospérité du corps et de la planète. En effet, j’ai pu vérifier lorsque je faisais mon TPE sur la production écologique de papaye à Malaga que la consommation de produits agricoles locaux peut être mille fois moins polluante que la consommation de produits importés – notamment ceux qui proviennent du Canada après la signature du CETA – mais qu’il est de même crucial que le choix de cultiver certaines espèces végétales respecte les conditions de terrain et de météorologie locales. Ainsi, en tant que citoyen responsable et consciencieux, acheter des produits aux AMAP du Havre est une attitude à encourager. D’autre part, la plantation massive d’arbres peut permettre de stocker l’excès de dioxyde de carbone atmosphérique dans les forêts, mais cette solution ne peut être que temporaire car la mort des arbres provoque une libération de carbone qui, par oxydation, repasse à l’atmosphère sous forme de CO2. Ceci étant dit, il est indispensable, en tant que bon citoyen, de promouvoir cette solution qui, bien que temporaire, est nécessaire, notamment par l’utilisation du moteur de recherche Ecosia: une démarche plutôt simple. De même, manifester pour le climat, s’engager dans des projets écologiques, adopter des modes de vie plus respectueux de l’environnement sont des actes indispensables si l’on veut véritablement résoudre la situation de crise écologique et existentielle à laquelle nous faisons face.
En ce qui concerne les solutions que peuvent apporter les Etats, il y a un répertoire de propositions chiffrées disponible sur le site Project Drawdown, parmi lesquelles la construction d’éoliennes s’avère une solution efficace du point de vue environnemental, en plus d’être très rentable avec un rapport de 1 à 6 entre dépenses et bénéfices sur le long-terme. Parmis les solutions proposées, on retrouve la réduction du gaspillage alimentaire, l’éducation des filles dans le monde ou encore l’interdiction mondiale de l’utilisation du HFC dans les appareils réfrigérants selon un amendement du Protocole de Montréal, par exemple. La piézoélectricité, bien qu’en phase expérimentale, est une autre idée innovante qui pourrait permettre la récupération d’énergie à partir du contact et de la pression de nos pieds lorsque nous marchons ainsi que des voitures. Les Etats devront aussi investir massivement pour mettre en place l’économie de l’avenir. Sachant que la décroissance ne peut qu’être une phase transitoire entre notre modèle économique actuel et un autre que beaucoup nomment déjà l’économie circulaire, basée sur le triptyque: réduire, recycler, réutiliser. Des prémices de ce nouveau modèle sont déjà visibles dans l’Union Européenne mais aussi dans certains pays asiatiques à l’instar de la Chine, notamment avec la loi de 2008 sur la promotion de l’économie circulaire. Ici en Normandie, nous avons un bon exemple d’une des idées phare de l’économie circulaire qu’est la méthanisation, et qui, dans notre cas, permet de récupérer de l’énergie électrique et thermique à partir de dizaines de milliers de tonnes de déchets organiques, qui sont ainsi revalorisées.
Enfin, au-delà des défis immenses et des solutions souhaitables, une question émerge. C’est celle de notre volonté et de notre responsabilité. Peut-on qualifier un gouvernement de responsable alors que certaines mesures en faveur de l’environnement coexistent avec le refus de fermer des centrales de charbon ou avec le maintien de certains perturbateurs endocriniens extrêmement nocifs pour notre santé ? C’est de cette hypocrisie dont nous devons réfléchir nous-mêmes dans un souci de cohérence. Si la vie sur Terre est une priorité ou un devoir pour nous, alors nos actes doivent démontrer la responsabilité écologique qu’est la nôtre et que nous ressentons, c’est-à-dire que nos actions concrètes doivent être respectueuses et engagées vis-à-vis de l’environnement, le cas contraire cela signifierait que nous n’avons pas de véritable volonté de préserver la vie sur notre planète. La vie est-elle suffisamment importante pour nous pour que nos actions et notre volonté soient en compatibilité avec elle ?